Carpenter Brut: EP I / EP II
Il y a des jours comme ça où l’on ne s’attend pas à faire une aussi bonne découverte, tellement bonne que depuis elle m’accompagne en fond sonore quotidiennement. Ubisoft via son compte Twitter balance sur ma timeline le nouveau trailer du jeu The Crew, un jeu de course de voitures communautaire qui ne m’avait pas du tout intéressé lors de sa première annonce lors de l’E3 2013. Je lance la vidéo et bizarrement le trailer retient mon attention contrairement à celui de juin 2013, un je ne sais quoi d’hypnotique me fait rester jusqu’à la fin de la bande annonce, et même la visionner une deuxième fois jusqu’à ce que je comprenne: la musique choisie pour le trailer n’est autre que “Le Perv” de Carpenter Brut.
Sans perdre de temps je “googlise” Carpenter Brut pour tomber sur son site officiel/bandcamp qui à ma grande surprise propose l’écoute intégrale de ses deux EP, une heure plus tard j’étais passé à la caisse sur l’iTunes Store (la version CD des EP étant malheureusement épuisée). Que les choses soient claires, ma culture musicale du genre reste limitée aux artistes électro déjà médiatisés (Justice, Kavinsky, Wolfgang Gartner, etc. ) connus du commun des mortels adhérant ou non à cette scène musicale. Mais quand les sonorités de Carpenter Brut transpirent un amour immodéré d’une certaine vision des années 80 (parfois idéalisées) fortement imprégnées par le cinéma de Big John Carpenter, Dario Argento, au Giallo et autres genres chers à Mad Movies, je ne peux qu’adhérer. Forcément, j’ai voulu en savoir plus sur le ou les artistes se cachant derrière ma nouvelle idole électro, mais le mystère entretenu par Carpenter Brut sur Internet est impressionnant d’efficacité. Aucune information officielle, seul le recoupement de quelques rares articles de blog éparpillés sur la toile me permet de croire que Carpenter Brut n’est qu’une seule et même personne, française de surcroît, mais quid de son âge, de son identité, de son parcours, de ses influences… On frôle la légende urbaine, mais ce dont on est sûr, c’est sa parfaite maîtrise de mélodies mêlant synthétiseurs, riffs électriques et beats endiablés perpétuellement ancrés dans une ambiance fantastique. A l’écoute de ces deux EP il suffit de fermer les yeux pour se remémorer les meilleures images de Prince of Darkness, Big Trouble in Little China, They Live… C’est dire à quel point la musique de Carpenter Brut est cinématographique, chaque morceau racontant une histoire à part entière (initiée par le titre du track), et chaque EP réunissant 6 morceaux dans un tout cohérent, bien plus en tout cas que ne peut l’être le pourtant sympathique Out Run de Kavinsky.
Le premier EP, affichant un magnifique artwork inspiré (que valideraient certainement Rob Zombie ou Ti West) laisse presque croire à un album de black metal avec son église isolée, enneigée, arborant une croix inversée ne laissant aucun doute sur les coutumes locales. Mais il n’en est rien, le morceau “Escape From Midwitch Valley” rend hommage (ou en tout cas me fait tout de suite penser) à Argento et au groupe Goblin. S’enchaîneront par la suite ambiances tantôt transalpines, tantôt américaines entre dancefloor satanique, thème type du héros ricain badass ou invasion de créatures revenant sur terre faute de place en enfer. “Le Perv” clôturera magistralement l’EP avec une montée en puissance dans la deuxième partie du morceau (ma préférée à partir de 2:24), un crescendo ne laissant aucune lueur d’espoir, à l’image de la majorité des fins réalisées par John Carpenter ou Dario Argento. Silver Strain a d’ailleurs intelligemment mis “Le Perv” en images en montant une vidéo (faisant office de clip officiel) à partir de scènes du film Murder-Rock: Dancing Death (1984), sorte de tribute à son réalisateur Lucio Fulci et aux legwarmers.
Le deuxième EP quant à lui, bien qu’encore plus maîtrisé reste parfaitement cohérent et dans la continuité du précédent (je les écoute d’ailleurs tous les deux en boucle comme un seul et unique album). Il commence par un tubesque “Roller Mobster” qui s’enchaîne sans prévenir personne avec un non moins réussi “Meet Matt Stryker”, un Matt Stryker que j’imagine interprété par Kurt Russel roulant à toutes berzingues au volant d’une Corvette Sting Ray (j’avoue la référence non dissimulée à Mike Post). S’ensuit l’envoutant “Obituary” que Silver Strain a parfaitement mis en image via ce clip (cependant déconseillé aux plus jeunes) en criant son amour pour Takashi Ishii. Mais tout cela n’était qu’un amuse-gueule avant l’arme de destruction massive qu’est “Looking for Tracy Tzu”, LE morceau qui méritait sa place tant dans tous les dancefloors de l’hexagone que dans le soundtrack du Drive de monsieur Nicolas Winding Refn. Un morceau tellement puissant que pour annoncer la sortie de l’EP II, Carpenter Brut sollicita les services des Deka Brothers qui réalisèrent un teaser tout simplement génial utilisant (et magnifiant) “Looking for Tracy Tzu”. Mieux que les mots, lancez la vidéo ci-dessous…
L’EP II se concluera magistralement avec le très rythmé “SexKiller On The Loose” (que j’utilise en boucle pour maintenir la cadence de mes 10km de footing, c’est dire… et sur un “Hang’Em All” faisant parfaitement office de final, dont certaines mélodies à partir de 3:30 m’ont évoqué du très bon Michiru Yamane aux sonorités Castlevania-esques. Bref, deux EP dont le principal défaut est d’être trop beaucoup trop courts, et teasant un troisième opus qui se fait désirer. Tellement, qu’un inespéré teaser l’annonçant pour décembre 2014 est visible depuis peu…
Vous l’aurez compris, Carpenter Brut, c’est de la bombe, Carpenter Brut c’est ma came depuis 5 mois sans aucune modération et Carpenter Brut, c’est un artiste qui mériterait d’être autrement plus connu et médiatisé tant pour nous pondre des triple albums qui n’en finiraient plus mais surtout pour que son incroyable talent soit reconnu. Mais là c’est une autre histoire…